Communiqué de presse
Centre des travailleuses et travailleurs immigrants, Mouvement Action-Chômage de Montréal, Association des juristes progressistes (AJP)
Montréal 24 mai 2019
Le 10 mai 2019, la Cour canadienne de l’impôt a rendu une décision historique en reconnaissant que les travailleurs étrangers temporaires peuvent être admissibles aux prestations d’assurance-emploi (AE), même s’ils ont travaillé sans permis de travail valide.
Accompagné par le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants, un groupe d’environ 18 travailleurs étrangers temporaires originaires du Guatemala a fait appel d’une décision de la Cour canadienne de l’impôt qui refusait de reconnaître que leur emploi était assurable en vertu du droit canadien.
En effet, ces travailleurs, recrutés dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires, ont été victimes d’une fraude perpétrée par plusieurs entreprises québécoises. Ces entreprises les ont trompés en leur disant qu’ils pouvaient travailler pour des employeurs différents de celui qui les avait embauchés. Or, cela est contraire à la loi.
L’Agence du revenu du Canada (ARC) a considéré que les heures travaillées n’étaient pas assurables, puisque leur permis de travail ne leur permettait pas d’être employés par d’autres entreprises. L’ARC a systématiquement exclu un nombre considérable de travailleurs migrants sans emploi sous prétexte que leur emploi n’était pas couvert par un permis de travail. Cette exclusion exacerbe une situation de vulnérabilité.
Dans cette décision qui fait jurisprudence, la Cour canadienne de l’impôt a conclu qu’un travail peut être assurable en vertu de la loi sur l’assurance-emploi, même si les heures travaillées résultent d’un emploi exercé sans permis de travail valide. Selon ce jugement de 48 pages, la pratique de l’ARC viole la loi sur l’assurance-emploi.
Elle considère que l’interdiction de travailler sans permis valide n’implique pas nécessairement que les travailleurs soient exclus de l’assurance-emploi, étant donné l’obligation de l’État de garantir l’accès de tous les travailleurs aux services sociaux publics. Par conséquent, la Cour considère qu’il est dans l’intérêt public de reconnaître l’importante contribution des travailleurs migrants à l’économie canadienne et qu’il est inacceptable de les exclure systématiquement.
La Cour a noté que l’obligation faite aux travailleurs étrangers d’avoir un permis de travail au Canada est historiquement enracinée dans la priorité accordée aux citoyens canadiens sur les marchés du travail. Néanmoins, dans son analyse, la Cour a estimé que dans le contexte actuel, « il est évident que des milliers de travailleurs agricoles temporaires ne représentent pas une menace ou un obstacle aux droits des travailleurs canadiens ».
Le Centre des travailleuses et travailleurs immigrants, le Mouvement Action-Chômage de Montréal et l’Association des juristes progressistes (AJP) souhaitent saisir cette occasion pour souligner cette avancée importante pour les droits des travailleurs migrants.
Viviana Medina, une organisatrice du CTI, a déclaré : « Cette décision historique n’est pas seulement synonyme de justice pour ce groupe de travailleurs guatémaltèques mais aussi pour des milliers de travailleurs temporaires qui se voient systématiquement refuser l’accès à la protection sociale et aux droits du travail. Nous espérons également que cette décision qui émane d’un tribunal fédéral oblige le ministre de la Sécurité publique à reconnaître que les mesures d’interdiction, qui interdisent à ce groupe de travailleurs de revenir au Canada, parce qu’ils ont travaillé sans permis de travail, sont infondées, ridicules et inacceptables. »
Jérémie Dhavernas, organisateur du Mouvement Action-Chômage de Montréal, déclare : « Il est incroyable de devoir se rendre à la Cour canadienne de l’impôt pour établir un droit qui devrait déjà être évident. Depuis 1990, l’État canadien a systématiquement violé les droits des travailleurs à l’assurance-emploi, qu’ils soient migrants ou non. Nous nous réjouissons de cette victoire, qui pourrait éventuellement contribuer à d’autres luttes pour réduire les abus subis par les travailleurs migrants.
M. Richard-Alexandre Laniel, avocat des travailleurs et directeur de l’AJP, affirme : « Tous les travailleurs, indépendamment de leur statut d’immigration et de leur origine nationale, devraient avoir droit aux services publics de protection sociale. Cette décision est d’autant plus importante qu’elle renverse une jurisprudence qui exclut systématiquement les travailleurs étrangers temporaires sans permis de travail valide des prestations de l’assurance-emploi ».
Les personnes ci-dessous, ainsi qu’un membre du groupe qui a participé à ce processus juridique, sont disponibles pour des entretiens.
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Contacts médias :
-Richard-Alexandre Laniel, Association des juristes progressistes : 514 690 2988
-Viviana Medina, Centre des travailleuses et travailleurs immigrants : 514 342 2111
-Jérémie Dhavernas, Mouvement Action-Chômage de Montréal : 514 271-4800
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