Nov 03

Migrant·e·s : boucs-émissaires des politiques d’immigration Québec-Canada

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Les personnes migrantes, transformées en bouc-émissaires par les politiques d’immigration du Québec et du Canada

Montréal, le 2 novembre 2023. – Le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada ont annoncé leur plan d’immigration, en spécifiant notamment les seuils d’immigration pour les prochaines années. La mise sur pause des seuils conjuguée au fait d’ignorer les centaines de milliers de travailleurs étrangers temporaires, demandeurs d’asile ou sans papiers déjà présents sur le territoire revient à les désigner comme les responsables des dysfonctionnements sociaux, économiques et culturels. Le Centre des travailleurs et travailleuses immigrant s’élève contre cette fuite en avant qui transforme les personnes migrantes et immigrantes en bouc-émissaires

Un agenda commun : utiliser les travailleurs temporaires comme variable d’ajustement

Les deux gouvernements ont annoncé le plafonnement du nombre de personnes admises annuellement comme résidentes permanentes: au Québec, 50 000 personnes plus les personnes admises dans le volet Diplômés du Programme de l’expérience québécoise (2024-2025) et au Canada, 500 000 (2025-2026). En revanche, aucun plan visant l’amélioration de la protection des droits des personnes qui entrent ou se trouvent déjà ici avec un statut migratoire temporaire ou sans statut n’a été présenté, alors que leur nombre est en croissance permanente. Aucune annonce non plus d’une abolition du permis fermé, pourtant réclamée par nombre d’organisations communautaires et syndicales. Rien sur la régularisation des personnes sans papier, malgré la promesse faite par Justin Trudeau il y a vingt-trois mois. Or, c’est sur toutes ces personnes que repose le fonctionnement de tout un pan de l’économie, mais on ne leur reconnaît pas les mêmes droits fondamentaux qu’à n’importe quel autre citoyen.

C’est particulièrement vrai au Québec où la croissance des travailleurs migrants dans le PTET au cours des huit dernières années est la plus importante au Canada – elle est de 234 % au Québec, alors qu’elle est de 80,06 % dans l’ensemble du Canada, selon les données de l’IRCC. Or, les recrutements sont encouragés et même subventionnés par le gouvernement du Québec. Alors que la ministre Christine Fréchette s’étonne d’une telle croissance, elle en reporte la responsabilité sur ces travailleuses et travailleurs en restreignant leur accès à la résidence permanente et les conditions de renouvellement de leur permis de de travail au-delà de trois ans.

Enfin, alors que le fédéral continue d’afficher une volonté de respecter les droits des réfugiés et demandeurs d’asile à être accueillis, Québec n’a pas un mot sur ce sujet et laisse à un très bas niveau les quotas d’accès à la résidence permanente pour ces filières ainsi que pour le regroupement familial, ce qui signifie des années et des années d’attente et de douloureuses séparations des familles.

La priorité au français, prétexte pour conduire une politique discriminatoire

Au Québec, où la consultation publique a fait ressortir les critiques unanimes de la société civile à l’encontre du permis fermé, le gouvernement Legault et sa ministre Fréchette se dirigent vers une fausse alternative, qui est celle d’un permis sectoriel ou régional qui ne règlera rien.

En outre, les personnes admises dans le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) se verront désormais obligées de prouver leur niveau de français s’ils veulent voir leur permis temporaire renouveler au-delà de trois ans. Bien que nombre d’entre elles souhaitent l’obtention de la résidence permanente, celle-ci est irréalisable pour la majorité qui occupe un emploi moins spécialisé – plus de 80% des personnes admises dans le PTET –, parce que le Programme de l’expérience québécoise (PEQ) les exclut carrément et que le Programme de sélection des travailleurs qualifiés (PSTQ) impose des critères sévères.

Selon le nouveau plan, les employeurs seront tenus de libérer des plages horaires pour que ces travailleurs aient accès aux cours de francisation. On peut douter que cet objectif soit atteint étant donné que nombre de ces travailleuses et travailleurs sont déjà abusés et exploités sans que Québec se donne les moyens de vérifier le respect des droits minimaux par les employeurs.

Cette situation qui entérine un système d’immigration à plusieurs vitesses serait justifiée par le fait que les personnes migrantes et immigrantes seraient responsables du déclin du français au Québec, ce qui n’est absolument pas prouvé. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte comme le fait que l’anglais est la langue dominante dans le monde, et que de plus en plus d’étudiants francophones souhaitent étudier en anglais. En désignant les personnes migrantes et immigrantes comme responsables d’un déclin du français, le gouvernement Legault veut donner le sentiment d’agir pour préserver la langue française, mais il suit ainsi une pente dangereuse, à caractère xénophobe.

Au fédéral, une politique conservatrice pour ne pas effrayer l’électorat… des conservateurs ?

L’annonce présentée par le ministre Marc Miller repose en réalité sur un discours inquiétant : le maintien des cibles annoncées est justifié par la nécessité de tenir compte des capacités d’accueil au pays. Ce discours revient à donner du crédit à tous ceux qui pointent les personnes migrantes et immigrantes comme les responsables de la crise du logement, etc. Rien d’étonnant dans ces conditions à ce qu’un sondage révèle que la part des canadiens trouvant qu’il y a « trop d’immigration » a progressé. Cependant, c’est la spéculation immobilière, l’inflation et l’accroissement des inégalités, qui sont les principales raisons des difficultés post-pandémie des Canadiens de la classe moyenne ou peu aisée.

En outre, cette politique du bouc-émissaire fait l’impasse sur la situation des 1,8 millions de personnes résidant au Canada avec un statut temporaire, sans compter les personnes sans papier, qui se comptent en centaines de milliers. Toutes vivent et travaillent au Canada, sans que les structures d’accueil en souffrent. En revanche, faute de posséder des droits apportés par la résidence permanente, nombre d’entre elles sont vulnérables aux abus, aux harcèlements psychologiques et sexuels, travaillent dans les pires conditions.

Les annonces faites par les deux paliers de gouvernement continuent, par leur énoncé et leurs silences, à permettre le recours à la main-d’œuvre migrante comme un outil d’ajustement aux besoins du marché, tout en limitant leur accès égal aux droits fondamentaux.

Assez d’abus et d’exploitation. Les personnes migrantes et immigrantes ou sans-papiers ont droit au respect de leurs droits fondamentaux

 

Renseignements Cheolki Yoon, info@iwc-cti.ca

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